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Dans le cadre de mon Master 2 relations franco-italiennes, vous trouverez sur ce blog des informations relatives à l'agroalimentaire en général, et plus spécifiquement aux échanges franco-italiens.

Les pratiques alimentaires des consommateurs sont largement déterminées par leurs valeurs, leurs représentations et leur style de vie.
Faire connaître un vin ou un fromage ou une huile d’olive c’est aussi faire découvrir une culture, une histoire, une tradition, et parfois tout un savoir.
Dès lors comment réussir cette connexion entre produits et marchés ?
Comment pénétrer une culture différente, un autre style de vie ?
Comment mobiliser journalistes, relais d’opinion, réseaux de distribution ?

Périls en l'assiette

Malgré l’amélioration régulière de la surveillance, nos aliments restent exposés à dans risques sanitaires. En cause : les pollutions et l’agro-industrie, aux innovations rarement testées comme elles le devraient.
Le 24 Mai dernier, les autorités sanitaires allemandes lancent l’alarme : trois patients seraient décédés d’une hémorragie du tube digestif provoquée par une bactérie Escherichia coli. Et des dizaines d’autres souffrent d’une contamination dont le foyer semble situé au nord de Hambourg. C'est le début d’une crise sanitaire de près de trois semaines, qui va laisser l’Europe au bord de la psychose. Une affaire de la « bactérie tueuse » révélatrice des menaces contemporaines qui font régulièrement douter de la sécurité sanitaire de nos aliments. Dès le lendemain, les tomates, les salades et surtout les concombres (andalous) sont soupçonnés par le ministère allemand de l’Agriculture, soutenu par la Commission européenne. Une concombrophobie gagne subitement les consommateurs, le marché des cucurbitacées s’effondre. La Russie décrète un embargo sur tous les légumes provenant de l’union. L’épidémie reste pourtant confinée aux alentours de Hambourg. Et les quelques personnes contaminées hors d’Allemagne l’ont été après un séjour dans ce pays. 
Le 1er juin, la tension est à son paroxysme : après une semaine d’intenses investigations, c'est toujours le brouillard sur l’origine de cette bactérie très virulente. Une équipe chinoise identifiera la souche (Escherichia coli 0104 :H4), très rare et jamais impliquée dans une épidémie à ce jour. Les concombres sont mis hors de cause, mais il faudra attendre le 9 juin pour qu’une enquête massive, dans les exploitations agricoles, les chambres froides, les marchés et même le réfrigérateur des consommateurs malades, résolve l’énigme : la contamination provient de graines germées (luzerne, soja, lentilles…) qui seraient issues d’une ferme bio de Basse-Saxe. L’épidémie aura causé plus de 35 décès et intoxiqué près de 3000 personnes. Le préjudice économique pour les agriculteurs dépasserait les 600 millions d’euros.

CRISES SANITAIRES EN CASCADE
Maladie de la vache folle, fromages à la listeria, lait ou poulets à la dioxine, huile frelatée… Depuis une trentaine d’années, les crises sanitaires se succèdent dans le monde alimentaire, qu’il s’agisse de toxi-infections – l’invasion par des micro-organismes pathogènes (bactéries, virus…) – ou  de la contamination par des molécules chimiques. Un sentiment d’insécurité affleure chez les consommateurs, conforté par la confusion des messages : les poissons (riches en acides gras oméga 3) sont-ils bons pour la santé, ou bien faut-il les éviter en raison de leur capacité d’accumuler les toxiques ? Est-il raisonnable de manger « cinq fruits et légumes par jour » -message santé officiel –, alors que nos oreilles sont alertées par la présence de résidus de pesticides ?
Les industriels de l’agroalimentaire et les pouvoirs publics martèlent pourtant que l’alimentation n’a jamais été aussi sûre. Ils n’ont pas tord en valeur absolue : les systèmes de contrôle se sont multipliés, des chaînes de traçabilité des aliments se sont mises en place (en particulier pour la viande après la crise de la vache folle) afin de remonter rapidement à la source d’un incident. Par exemple, les cas de listériose (intoxication due à une bactérie listeria, en général sur les fromages) ont été divisés par près de trois depuis vingt ans. 
Cependant, ce qui a changé depuis quelques années, c'est le nombre, plus important, de personnes âgées dans la société, en moyenne plus fragiles devant les intoxications alimentaires. Le public est aussi plus attentif et exige une information, qui, à l’ère d’Internet, se répercute instantanément et amplifie les rumeurs et les phénomènes d’emballement. Et surtout, l’industrie agroalimentaire a fortement accru son emprise sur les produits qui parviennent dans nos assiettes.

3 MILLIONS DE DIARRHÉES INFECTIEUSES
Ainsi les toxi-infections par des bactéries sont courantes – pour l’essentiel dues à la famille des salmonelles et à des listerias. En France, l’ingestion d’aliments contaminés par des micro-organismes est responsable chaque année d’environ 3 millions de diarrhées infectieuses (très majoritairement bénignes) recensées en consultation. Cependant, de nouveaux risques sont apparus en raison d’une course à la rentabilité qui a engendré des dérives inquiétantes, notamment dans le domaine de l’alimentation animale. La maladie de la vache folle, une contamination alimentaire due à un prion, en est l’exemple le plus traumatisant.

En juin 2011, sept enfants ont été hospitalisés au CHU de Lille. en cause, un type rare de bactérie Escherichia coli liée à la consommation de steak hachés.

L’APPARITION DE BACTÉRIES RÉSISTANTES
L’utilisation massive d’antibiotiques dans les cheptels a également des conséquences préoccupantes : les souches dominantes de salmonelle sont désormais résistantes à la plupart des traitements. On doit aussi aux antibiotiques l’émergence, à partir des années 1980, de la variété Escherichia coli O157 :H7, découverte dans de la viande hachée aux États-Unis. Très invasive, résistante à l’acidité gastrique des bovins et à la chaleur (jusqu’à près de 60 °C'est), elle est responsable de plusieurs milliers de cas de « maladie du hamburger » dans le monde et de dizaine de décès. La variété O104 :H4, responsable de la crise des graines germées allemandes, semble de la même trempe.

 
GRANDS SCANDALES ET POLLUTION LOURDES
La commercialisation généralisée des produits sur de grandes distances et à flux tendu est aussi un facteur de démultiplication des menaces : une contamination localisée peut se répandre très rapidement, avec des proportions potentiellement démesurées. En 1994, plus de 200 000 personnes ont été rendues malades aux États-Unis après la consommation d’une crème glacée laissée au contact de résidus d’œuf cru contaminé par une salmonelle dans des conteneurs de transport. 
De même, l’empoisonnement d’aliments par des produits chimiques est à l’origine de grands scandales. En 1981, 1200 personnes meurent en Espagne de l’ingestion d’une huile de colza frelatée bon marché, foudroyées par un additif chimique (l’aniline). 
En 1999, on découvre des dioxines dans des farines destinées à l’alimentation de poulets d’élevage industriels en Belgique. Ces résidus hautement cancérigènes provenaient d’huile de vidange frauduleusement recyclées pour enrichir la ration des animaux. 
Des dioxines encore, sous le vent d’incinérateurs à la combustion mal réglée ou sous-équipés en système de filtrage : en 2001, celui de Gilly-sur-Isère (Savoie) est fermé quand on découvre que ses fumées ont intoxiqué des élevages (et des populations) dans un rayon de 10 kilomètres. Œufs, viande, lait et dérivés sont contamines et détruits, plusieurs milliers d’animaux sont abattus.

LE RISQUE AU CŒUR DES ALIMENTS
Le risque alimentaire est aussi concocté par l’industrie elle-même. On recense ainsi plus de 3 500 arômes sur le marché, dans presque tous les produits transformés. Or, leurs effets sanitaires, en combinaison notamment, sont quasi inconnus. L’aspartame, édulcorant dominant des boissons, friandises, etc. fait polémique en tant que cause possible de cancers. Parmi tous les autres « additifs » de synthèse (conservateurs, antioxydants, acidifiants, émulsifiants, exhausteurs de goût, agents d’enrobage, gaz propulseurs…), certains sont à l’origine d’allergies, de troubles digestifs, de maux de tète. On peut s’interroger sur leur rôle dans le déclenchement de cancers ou de pathologies comme la maladie d’Alzheimer.


TOUTE LA POPULATION POURRAIT ÊTRE TOUCHÉE
Au-delà de telles crises, résultant de malversations ou d’irresponsabilités, les situations de contamination par des molécules chimiques semblent mineures. Que l’on se détrompe : la question fait l’objet de controverses croissantes, et les conséquences pourraient être considérables. L’équivalent côté chimie, des 3 millions de diarrhées infectieuses bénignes dues aux toxi-infections, c'est l’exposition chronique, pendant des années et à faibles doses, de l’intégralité de la population (ou peu s’en faut, comme le montre régulièrement les analyses de sang) à des résidus de produits phytosanitaires, des métaux lourds, des polluants organiques persistants (POP), etc.

MOLÉCULES CHIMIQUES DANS LES ORGANISMES
De l’ordre de 100 000 molécules chimiques sont en circulation en Europe, dont une partie se retrouve de manière diffuse dans l’environnement, polluant l’eau, l’air, les sols. Par accumulation successive dans les organismes, le long de la chaîne alimentaire, les moins dégradables, comme les POP (dont les dioxines font partie) se stockent dans les organismes. C'est le cas pour les poissons carnivores, entre autres, dans la chaire desquels se retrouvent aussi des métaux lourd (mercure, plomb, cadmium) relâchés par l’industrie ou par les stations d’épuration.

PESTICIDES DANS LES FRUITS ET LÉGUMES
L’agriculture française est l’une des plus grosses consommatrices de produits phytosanitaires au monde (engrais, pesticides…), dont les résidus sont régulièrement ingérés via l’alimentation.  La Commission européenne relève régulièrement des dépassements des doses journalières admissibles (DJA) approchant 10 % sur des fruits et légumes, dont 40 % présentent des traces détectables d’un ou de plusieurs produits. 

QUE SAIT-ON DES IMPACTS SANITAIRES ?
Alors que l’effet de ces faibles doses régulièrement administrées reste très peu étudié, que pensez de la pertinence de ces DJA, fixées de manière aussi arbitraire ? 3 000 molécules chimiques seulement ont fait l’objet en Europe d’une étude d’impact sanitaire, qui ne dit rien, par ailleurs, des possibles interactions entre toutes les espèces chimiques accumulées dans l’organisme (effet « cocktail »). Une bombe sanitaire en gestation.

DES PERTURBATEURS ENDOCRINIENS
La contamination chimique, c'est aussi l’absorption de résidus médicamenteux (hormones, antibiotiques, activateurs de croissance) présents dans la chaire d’animaux traités et abattus avant le délai de latence prescrit ; ou encore le contact des composants (phtalates, bisphénol A) présents dans des matières plastiques utilisées comme emballages ou ustensiles alimentaires (boites, biberons). Des molécules très peu anodines : ce sont des perturbateurs endocriniens, susceptibles d’entrainer des malformations ou des disfonctionnements du système reproductif. Malgré un nombre important d’études scientifiques probantes, la prise de conscience de ce risque toxique n’en est qu’à ses débuts.

LES RISQUES ALIMENTAIRES DE DEMAIN
Le front du risque alimentaire est en perpétuelle  évolution, tant les pollueurs et l’industrie agroalimentaire semblent disposer d’un perpétuel train d’avance sur la réglementation et sur la recherche sanitaire. S’il fallait discerner quelques batailles de demain, elles sont en gestation du côté de ces « nouveaux aliments » concoctés par les biotechnologies. La contestation sanitaire est notoire pour les aliments transgéniques ou dérivants de plantes ou d’animaux OGM, en circulation depuis plus de dix ans, alors que les risques alimentaires ont très peu fait l’objet d’investigations. 
Mais déjà bruissent des alertes du côté des produits issus d’animaux clonés. En  août 2010, on a découvert que du lait et de la viande de bovins-éprouvette ont été vendus en Grande-Bretagne. Par inadvertance, alors que l’Europe exige une autorisation ? « Il n’y a pas de risque alimentaire », s’est autodédouanée l’industrie laitière.
Et l’on s’inquiète aussi d’aliments contenant des particules élaborées par nanotechnologies. L’industrie agroalimentaire s’y prépare. L’exemple emblématique du nanoaliment « du futur », annoncé par le géant Kraft, est une boisson neutre, dont le gout serait sélectionné par le consommateur grâce à un activateur à micro-ondes, qui libèrerait au choix l’un des aromes enfermés dans des nano-capsules contenues dans le liquide.

ALIMENTS IRRADIES : QUEL CHOIX ?
Soumettre les aliments à un rayonnement radioactif afin de tuer les germes : cette technique sanitaire, dite « ionisation » (sans contamination radioactive), vise aussi à accroitre la durée de conservation de nombreux aliments frais (germination inhibée, pourrissement retardé…) pour en faciliter le commerce. Critique du Collectif français contre l’irradiation des aliments : le procédé modifie la teneur en vitamines, dégrade les graisses, formerait des molécules à pouvoir cancéreux et faciliterait la migration de substance contenues dans les emballages plastiques. En théorie, on doit lire sur l’étiquette : « traité par ionisation », même pour un seul ingrédient (épice, par exemple), cependant sans mention obligatoire de date d’irradiation et de dose appliquée. Le Collectif déplore aussi un manque de contrôle.